Chirurgiens-dentistes et prise en charge du tabagisme
Le RESPADD (Réseau de Prévention des Addictions) a réalisé au premier trimestre 2022 une enquête visant à illustrer les pratiques des chirurgiens-dentistes dans la prise en charge du tabagisme.
Un questionnaire a ainsi été transmis aux représentants d’URPS Chirurgiens-Dentistes en France métropolitaine.
105 chirurgiens-dentistes ont répondu à cette enquête, en voici les principaux enseignements.
Le RESPADD est une association à but non lucratif qui fédère plus de 600 établissements de santé (hôpitaux, cliniques, EHPAD, établissements médico-sociaux, etc.) engagés dans la prévention et la prise en charge des pratiques addictives.
Demandez-vous à vos patients s’ils sont fumeurs ? Inscrivez-vous le statut tabagique dans le dossier du patient ?
76 % des chirurgiens-dentistes demandent systématiquement à leurs patients s’ils sont fumeurs, et 24 % le demandent aléatoirement/ de temps en temps, en fonction d’éléments observés chez le patient.
61 % des chirurgiens-dentistes inscrivent systématiquement le statut tabagique dans le dossier du patient.
31 % l’inscrivent « parfois » ou « rarement », et 8 % ne l’inscrivent « jamais ».
En prévision de quel type d’actes êtes-vous incités à aborder la question du tabagisme ?
Les chirurgiens-dentistes sont majoritairement incités à aborder la question du tabagisme en prévision de soins parodontaux (83 %), d’actes de chirurgie (79 %), d’actes de prophylaxie et de prévention (72 %) ainsi que d’actes prothétiques et d’implantologie (65 %).
4% des professionnels interrogés l’abordent en prévision d’actes d’imagerie, d’orthodontie ou d’éclaircissement.
15 % des chirurgiens-dentistes sont incités à aborder ce sujet en prévision de tous les actes de soin.
Quand effectuez-vous ce repérage ?
Le repérage des fumeurs est majoritairement effectué dès la première visite du patient (86 %), s’il présente des signes caractéristiques du fumeur (53 %) et/ou s’il souffre de symptômes/d’affections liées au tabac (40 %).
Un quart des chirurgiens-dentistes déclare effectuer ce repérage lors de visites ultérieures à la première visite.
5 % des professionnels interrogés effectuent un repérage même si le patient ne présente aucun symptôme ou pathologie lié au tabac.
Demandez-vous à vos patients fumeurs s’ils souhaitent arrêter de fumer ?
45,2% des professionnels demandent « parfois » à leurs patients fumeurs s’ils souhaitent arrêter de fumer.
30,8% le demandent « systématiquement », 18,3% le demandent « rarement » et 5,8% ne le demandent « jamais ».
Évaluez-vous le niveau de dépendance de vos patients fumeurs (quantité de tabac consommé, fréquence…) ?
30 % des chirurgiens-dentistes évaluent « systématiquement » le niveau de dépendance de leurs patients.
24 % l’évaluent « parfois », 14 % l’évaluent rarement et 32 % ne l’évaluent jamais.
Si oui, à quel outil d’évaluation avez-vous recours ?
Sur les 68 chirurgiens-dentistes évaluant la dépendance de leurs patients fumeurs, 43 ont répondu à cette question.
Près de 30% d’entre eux interrogent leurs patients fumeurs sur le nombre de cigarettes fumées par jours.
25 % déclarent avoir recours au Test de Fagerström, et 15 % au Cigarette Dépendance Scale.
Le reste des professionnels répondants déclare interroger les patients fumeurs sur le nombre de paquets fumés par année et/ou sur la capacité des patients à arrêter de fumer pendant un ou plusieurs jours.
Parlez-vous à vos patients fumeurs des effets du tabac sur la santé bucco-dentaire ?
45 % des chirurgiens-dentistes informent systématiquement leurs patients fumeurs des effets du tabac sur la santé bucco-dentaire. 50% en parlent « parfois », et 5% « rarement ».
Disposez-vous, au sein de votre(vos) lieu(x) d’exercice(s) de documentation écrite sur le tabac et le sevrage tabagique ? Si oui, transmettez-vous cette documentation à vos patients fumeurs ?
20% des chirurgiens-dentistes, soit 21 sur 105, disposent de documentation écrite sur le tabac et le sevrage tabagique dans leur(s) lieu(x) d’exercice(s).
Sur ces 21 chirurgiens-dentistes disposant de documentation écrite, 13 d’entre eux la transmettent « parfois » à leurs patients fumeurs ; 7 d’entre eux la transmettent « rarement » et un professionnel la transmet « systématiquement ».
Informez-vous les patients fumeurs des outils leur permettant de bénéficier de conseils en matière de sevrage tabagique, voire de rendez-vous avec des professionnels dédiés (exemple : Tabac Info Service) ?
La moitié des chirurgiens-dentistes informent les patients fumeurs des outils et dispositifs leur permettant d’être soutenus dans leur sevrage tabagique.
Prescrivez-vous à vos patients fumeurs des substituts nicotiniques ? Si oui, assurez-vous une ou des consultations de suivi spécifique ? Si non, recommandez-vous le recours à des traitements nicotiniques de substitution à vos patients fumeurs ?
12 % des chirurgiens-dentistes prescrivent « parfois » des substituts nicotiniques à leurs patients fumeurs et 16% en prescrivent « rarement ». 71 % n’en prescrivent jamais.
- 92 % des chirurgiens-dentistes prescrivant des substituts nicotiniques à leurs patients fumeurs n’assurent aucune consultation de suivi spécifique à la suite de cette prescription.
- 48 % des chirurgiens-dentistes ne prescrivant jamais de substituts nicotiniques en recommandent cependant le recours à leurs patients fumeurs.
Pensez-vous avoir les connaissances nécessaires pour conseiller un fumeur souhaitant arrêter de fumer ?
38% des chirurgiens-dentistes considèrent avoir les connaissances nécessaires pour conseiller un fumeur souhaitant arrêter de fumer.
Sur une échelle de 1 à 10, quelle est l’importance pour vous de prendre en charge le tabagisme dans le cadre de votre exercice ?
En moyenne, les chirurgiens-dentistes évaluent à près de 7/10 l’importance pour eux de prendre en charge le tabagisme dans le cadre de leur exercice.
Sur une échelle de 1 à 10, à combien évalueriez-vous aujourd’hui votre capacité à prendre en charge le tabagisme ?
En moyenne, les chirurgiens-dentistes évaluent à 4/10 leur capacité à prendre en charge le tabagisme.
Selon vous, quels éléments permettraient d’améliorer votre capacité à prendre en charge les personnes fumeuses ?
Les chirurgiens-dentistes interrogés ont identifié les pistes d’amélioration suivantes :
- Être formé et développer des compétences en tabacologie (49 %)
- Disposer d’informations et d’outils sur le tabagisme à transmettre aux patients (16 %)
- Disposer de temps disponible pour la prise en charge du patient (16 %)
- Valoriser le temps passé avec le patient : cotation des actes réalisés, honoraires de prise en charge, etc. (13 %)
Bilan
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- La consommation de tabac est évoquée avec le patient par la majorité des professionnels interrogés. Cependant, le statut tabagique n’est pas systématiquement inscrit dans le dossier du patient.
- Près d’1/3 des chirurgiens-dentistes ayant répondu à cette enquête déclarent prescrire des substituts nicotiniques à leurs patients fumeurs. La quasi-totalité d’entre eux n’assurent aucune consultation de suivi spécifique.
- 1/5 des chirurgiens-dentistes disposent de documentation écrite sur le tabagisme et le sevrage tabagique dans leur(s) lieu(x) d’exercice(s).
- Le manque de formation et d’information sur le tabagisme, ainsi que la non-valorisation du temps passé auprès des patients fumeurs, constituent les principaux freins à leur prise en charge par les chirurgiens-dentistes.