CPTS : Mutualiser les moyens différement

Interview du docteur Michel Sarniguet, Chirurgien-Dentiste

Porteur de projet de la CPTS Lourdes-Argelès-Vallée des Gaves

Quelles ont été vos motivations à porter un projet de CPTS ?

Il y a quelques années, j’ai créé avec mon épouse médecin généraliste et ses associés, une maison de santé d’initiative privée afin de mutualiser nos moyens en vue de se libérer du temps administratif et de pouvoir se recentrer sur le temps médical.

De fil en aiguille, nous avons constitué une équipe pluriprofessionnelle, qui compte à ce jour 15 praticiens, pour s’entraider et partager nos connaissances.

Rapidement, nous avons eu la volonté de rassembler au-delà de cette structure afin de toucher l’ensemble des professionnels de santé de notre territoire pour s’entraider et partager nos connaissances dans un mode de fonctionnement coordonné clair et lisible pour tous.

La communauté professionnelle territoriale de santé (CPTS) était la solution, car elle permettait de rassembler tous les acteurs de santé d’un vaste territoire : Lourdes Argeles et les Vallées des Gaves, (soit près de 44.500 personnes) tout en respectant les parcours et habitudes de chacun pour bâtir un projet commun.

Dr Michel Sarniguet

Dr Michel Sarniguet

(Dpt 65)

Quelles missions prioritaires mènera votre CPTS ?

Aujourd’hui, notre volonté est de tisser des liens entre les praticiens pour partager certains protocoles et améliorer l’efficience des soins sur l’ensemble de notre territoire. Notre objectif est d’améliorer la communication et la transmission des informations entre professionnels, faire progresser la connaissance des ressources sur le territoire aux fins de libérer du temps médical.

Actuellement, l’ensemble des professions de santé est représenté dans ce projet. Cette mobilisation devrait encore se renforcer une fois l’association mise en place.

Avec la création de cette CPTS, nous souhaitons faciliter l’accès à un médecin traitant et améliorer la prise en charge des soins non programmés. Mais également, optimiser la coopération entre les professionnels de santé de ville et leurs partenaires, type établissements de santé, pour organiser les parcours pluriprofessionnels notamment des personnes fragiles, insuffisants cardiaques. Enfin, nous souhaitons développer des actions coordonnées de prévention.

Quel a été le processus de montage de votre CPTS ?

Le processus est assez long et il faut accepter cette charge de travail supplémentaire, notamment sur toute la partie administrative. Mais l’Occitanie est dotée d’un guichet CPTS (issu d’un partenariat entre l’ARS, l’Assurance Maladie et les URPS d’Occitanie) dont le rôle est de faciliter le déploiement de ces projets et nous avons ainsi pu bénéficier d’un accompagnement tout au long de nos démarches. Ce guichet s’est par exemple chargé d’inviter nos collègues aux réunions d’informations.

Ces réunions ont eu pour but de présenter le projet de manière impartiale à chacun dans une démarche inclusive. Une fois ces réunions réalisées, nous avons choisi de pousser 5 sujets de santé précis pour avoir un effet rapidement quantifiable et probant pour les plus réticents. Nous ne voulions surtout pas construire une couche supplémentaire d’un mille-feuille déjà bien gourmand. Nous voulions créer un outil d’efficacité et d’émulation.

Le bureau de l’association a été créé sur la base de l’équipe qui nous avait aidé pour la vaccination Covid au sein de notre maison de santé. Enfin, les statuts ont été lus, relus, modifiés et déposés!

En tant que Chirurgien-dentiste pourquoi se lancer dans la création d’une CPTS ?

On ne peut pas à la fois se réclamer du paysage médical et rester en retrait. Notre rôle est aussi un rôle sociétal auprès de tous ceux qui en ont besoin. C’est en partie ce qui donne du sens à notre profession.

Il y a de multiples sujets qui nous concernent comme les gestions per-opératoires, les AVK, AOD par exemple, mais pas seulement, notre implication auprès des plus fragiles fait partie intégrante de notre rôle dans la société : l’aide aux personnes âgées dans les maisons de retraite, l’aide aux personnes atteintes de handicaps, la prise en charge des syndromes d’apnée hypopnée obstructive du sommeil,…
Par ailleurs, nous sommes aussi à la base d’une certaine technicité car nous avons des chaines de stérilisation permettant aux autres praticiens de pouvoir améliorer leur pratique. Nous pouvons donc apporter par nos compétences de gestion.

À ce stade, nous ne sommes plus Docteurs en Chirurgie dentaire mais architectes de coordination défendant chacune des professions de nos collègues comme si c’était la nôtre et œuvrant pour la santé de tous nos patients. Cela reste un très bon moyen de comprendre et d’accepter les autres.

À votre avis, pourquoi vos confrères sont-ils si frileux ?

Déjà, une partie de la profession a une idée floue de ce que sont les CPTS et les autres redoutent que les CPTS ne soient qu’une usine à gaz chronophage voire liberticide !

Si le cadre actuel des CPTS n’est pas parfait, il a au moins le mérite d’inciter les professionnels à se parler entre eux, de faire bouger les lignes et s’interroger sur sa propre activité : Qu’est-ce que j’aimerais mettre en place ou voir se mettre en place ? Qu’est ce qui me motiverait pour modifier mon organisation ?

Au final, je retiens de cette aventure que l’on apprend à connaitre nos collègues, à mettre un nom sur un visage, à comprendre l’autre pour fonctionner en harmonie et qu’ensemble nous profitons d’une certaine dynamique. Cela n’a pas de prix.


Communauté professionnelle territoriale de santé (CPTS) : ce qu’il faut savoir

Cartographie des CPTS d’Occitanie

Les communautés professionnelles territoriales de santé sont un mode d’organisation qui permet aux professionnels de santé de se regrouper sur un même territoire, autour d’un projet médical et médico-social commun. Peuvent s’y rassembler les acteurs : qui assurent des soins de premiers et seconds recours (médecins généralistes et spécialistes, infirmiers, pharmaciens…) exerçant seuls, en cabinet de groupe, en MSP ou en équipes de soins primaires ; des établissements hospitaliers (publics et privés) ; du secteur médico-social et social (EHPAD…). Le but : faciliter le parcours de soin des patients, tout en contribuant à améliorer les conditions d’exercice des praticiens.

Cliquer ici pour ajouter votre propre texte